[Critique] American Sniper

Beaucoup de nominations aux Oscars, un résultat au box-office tout simplement hallucinant : American Sniper débarque enfin en France et après toutes les polémiques qu’il a soulevées outre-Atlantique, la curiosité était grande. A la fin du film, un constat s’impose : le Clint Eastwood qui avait réalisé « Mémoires de nos Pères » et « Lettres d’Iwo Jima » a disparu.

Le film s’ouvre sur une séquence où Chris Kyle, l’anti-héros que l’on va suivre pendant deux heures, est contraint d’abattre un enfant muni d’une bombe prête à exploser sur des soldats américains. Un début audacieux pour montrer la dureté de ce qu’il doit faire…

Le problème est que pendant deux heures, Eastwood ne tranche jamais vraiment, faisant répéter aux admirateurs de Kyle que ce dernier est un héros alors qu’il a abattu au moins 150 personnes, ce qui a fait de lui le tireur le plus mortel de l’histoire ; un fait que Kyle a toujours pleinement assumé dans des déclarations sulfureuses. Dans le même temps, s’il tente de nous montrer les ravages du stress post-traumatique via une ou deux scènes prenant place après qu’il soit rentré chez lui, tout cela semble superficiel et Eastwood ne semble jamais savoir sur quel pied danser.

A ce titre, la structure du film est particulièrement décevante : si le montage chronologique ne pose pas de problème particulier, on assiste à quatre opérations sur le terrain entre-coupées par des scènes de dispute entre lui et sa femme, jouée par une Sienna Miller qui fait ce qu’elle peut dans un rôle bien unidimensionnel. L’autre souci du film est que s’il comporte, comme n’importe quel biopic, une part de fiction évidente, un fact-checking montre bien vite que le film comporte beaucoup d’erreurs (notamment sur le sniper syrien, ennemi redoutable des soldats américains finalement abattu par Kyle dans un ralenti américain assez hallucinant).

Le message diffusé est alors problématique, car si on sent malgré tout une volonté de montrer la guerre dans ses aspects les plus durs, il adopte le temps de quelques scènes un aspect « Call of Duty », qui fait passer le film pour un vulgaire Shoot’Em Up où les corps tombent avec, on le sent, une certaine fascination pour la personne qui les tue. Bradley Cooper a beau être impeccable, et mériter sa nomination aux Oscars, on ne peut s’empêcher d’être mal à l’aise devant les choix du personnage ; encore plus quand on voit qu’il ne semble avoir aucun remords. Le clou étant enfoncé par le générique final faisant définitivement passer Kyle pour un héros ayant droit à tous les honneurs possibles…

La mise en scène a beau être efficace et le casting solide, « American Sniper » déçoit à cause de son propos parfois douteux, entre patriotisme et dénonciation des conséquences de la guerre sur ses soldats. America, fuck yeah.

Succès monstre au box-office, American Sniper déçoit à cause de son propos trop flou.

Note :


 

American Sniper
Réalisé par Clint Eastwood
Avec Bradley Cooper, Sienna Miller, Luke Grimes, Jake McDorman, Navid Negahban,…

Date de Sortie : 18 février 2015
Genre: Biopic, Guerre, Drame

Synopsis: Tireur d’élite des Navy SEAL, Chris Kyle est envoyé en Irak dans un seul but : protéger ses camarades. Sa précision chirurgicale sauve d’innombrables vies humaines sur le champ de bataille et, tandis que les récits de ses exploits se multiplient, il décroche le surnom de « La Légende ». Cependant, sa réputation se propage au-delà des lignes ennemies, si bien que sa tête est mise à prix et qu’il devient une cible privilégiée des insurgés. Malgré le danger, et l’angoisse dans laquelle vit sa famille, Chris participe à quatre batailles décisives parmi les plus terribles de la guerre en Irak, s’imposant ainsi comme l’incarnation vivante de la devise des SEAL : « Pas de quartier ! » Mais en rentrant au pays, Chris prend conscience qu’il ne parvient pas à retrouver une vie normale.

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