Night of the Kings Avis critique du film (2020)

Lacôte utilise l’histoire de Roman pour expliquer le cycle historique de la violence et comment ce cycle a affecté son pays. Lacôte ajoute également une autre dimension à la narration de Roman en faisant des prisonniers de la MACA des acteurs de Roman. Comme un choeur grec, ils interviennent dans l’oraison de Roman pour interpréter des chansons dédiées à Zama. Ils applaudissent ou se moquent des rebondissements narratifs de Roman (nous savons que Roman connaissait Zama, mais nous ne pouvons pas dire s’il nous dit des faits ou de la fiction). À un moment donné, Roman décrit Zama comme un scorpion, et les prisonniers se regroupent pour intimer un scorpion. Les détenus ne recherchent pas la vérité dans leur conteur. Ils savent que son histoire est absurde. Néanmoins, il y a de la magie à laisser une histoire envahir votre esprit, votre corps et votre esprit. C’est cette incrédulité d’un narrateur certes peu fiable qui donne à ces hommes la liberté au-delà des murs de la prison.

La façon dont Lacôte utilise le fil de Roman pour non seulement mélanger le folklore ancien avec la création de mythes modernes, mais aussi des chants et des danses théâtrales, est un exploit du cinéma. Lacôte a exploré ces sujets dans son film précédent «Run», mais ici ils sont poussés à des paramètres plus élaborés. Il est également soutenu par la cinématographie évocatrice de Tobie Marier-Robitaille, qui suit avec grâce l’humeur unique de chaque époque, de l’éclairage orange urgent de la prison à la régalité pourpre chaude de la section des pièces d’époque, en passant par la planéité lumineuse de l’actuel Lawless Quarter. Marier-Robitaille saisit comment la lampe ambrée qui brille sur la poitrine de Roman correspond à la lune rouge tic-tac, fonctionnant comme le principal personnage caché du film.

L’astuce de «La nuit des rois» est aussi de savoir comment Lacôte protège son histoire toujours en cours de s’effondrer en virages sinueux, ou digressions, pour maintenir un rythme lucide. «La nuit des rois» ne traîne jamais pendant ses 93 minutes de vent en partie parce que les personnages ne sont que des pièces de théâtre. Prenez Silence (Denis Lavant), un foulque excentrique avec un coq perché sur son épaule, dont le seul rôle est d’avertir Roman. Ou la patsy ostensible, la prisonnière transgenre Sexy (Gbazi Yves Landry). Les personnages plats émousseraient la plupart des films, mais compte tenu de la nature complexe de la construction du monde de Lacôte, le sous-développement est en fait un atout qui permet à l’espace cinématographique tentaculaire de respirer. Tout comme la performance aiguë de Koné.

Avec «La nuit des rois», Lacôte fait tomber les frontières entre les époques et dissout mythe et réalité, performance et souvenir, en un tout. C’est un film épique assuré et énergique, qui célèbre comment la narration, l’oraison et le folklore nous apprennent notre passé afin que nous puissions changer notre présent.

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