[Critique] Shame

« Shame » ou une plongée dans la perversion des plus troublantes: Le Sexe.

 Shame traduit par Honte en français est un titre qui va totalement au film, car pour beaucoup l’addiction au sexe est une honte mais c’est très difficile de s’en séparer.

 Steve McQueen réunit un Michael Fassbender possédé et une Carey Mulligan totalement perdu pour montrer un homme qui a honte de lui-même.

 McQueen avait un grand problème : comment confirmer Hunger ? On peut faire un premier film très prometteur, est se planter totalement après, il faut réussir à étonner encore une fois, tout en se forgeant un style. Ben il a réussit totalement car Shame nous étonne même plus que ça, il nous met mal à l’aise au début. En effet, il a vraiment une photographie très léchée sans que ça devienne publicitaire, et une mise en scène à la fois virtuose, mais également par moment d’une grande sobriété, un travail sur le montage, sur la musique, sur les sons… Tout est très pensé, réfléchi, ici pas de place au hasard.

 Le rythme du film, avec ses passages micro-découpés, très bien foutus pour nous mettre dans la tête du personnage, comme des minis flash-back de la veille. La bande son du film, enivrante à souhait, et l’interprétation magistrale de Fassbender, totalement possédé, donnent une atmosphère angoissante et terriblement prenante. On se croirait dans une sorte d' »American Psycho » croisé avec « Black Swan ». Cette douleur de se rendre compte d’une obsession qui au final nous gâche la vie. Ici, c’est l’abus maladif du sexe à tous ses niveaux, dans une routine de vie tout ce qu’il y a de plus banal en surface. Et le sexe, Steve McQueen sait le filmer, et il ne s’en prive pas. Certains trouverons un peu gratuit tout ce déballage, mais comment nous faire entrer autrement dans la peau du personnage sans nous abandonner dans son quotidien lubrique.

 C’est une vision du cinéma comme une autre. Le film est intéressant parce qu’il n’est pas sur un sentier battu, on n’est pas sur le mec qui « oh mon dieu souffre d’une addiction » et qui va promettre à sa femme en gros plan qu’il va tenter de faire ce qu’il peut, c’est traité de manière bien plus habile. Déjà McQueen ose filmer nos acteurs nus. Fassbender montre qu’il n’a pas qu’Hollywood en tête après sa performance dans X-Men First Class, il ose retourner aussi aux sources, et tant mieux. Il confirme qu’il est un acteur à suivre, auquel il faut faire attention. Bon la coupe de cheveux de Mulligan ne me revient toujours pas (ça fait bizarre quand on l’a vu tout le temps les cheveux longs), mais ça m’empêche pas qu’elle est vraiment excellente…

 La subtilité du traitement de l’histoire est vraiment un point positif, on commence en se disant que ce mec pourrait avoir la belle vie, il passe son temps à séduire, à baiser, et puis même si c’était montré au début, on commence à voir que sa vie ne tourne presque qu’autour que du sexe, si ça lui rend service dans des situations, ça lui en plombe d’autres etc. Et c’est toujours très bien amené. 

 Ce qui est fascinant c’est que McQueen ose le temps réel, des plans séquences de dispute, par exemple, ou bien la scène du chant… Il ose remettre la temporalité dans le cinéma. D’habitude le temps est accéléré pour donner un faux rythme à l’histoire, ou bien dilaté dans certaines scènes d’actions, là il réel, et ceci plusieurs fois dans le film. Je dois dire que ça me plaît beaucoup. Je ne saurai dire si c’est mieux que Hunger mais je pense que ça le vaut largement, le sexe en plus. Et le fait de ne jamais dire clairement quel est le problème de Fassbender, c’est une approche sympathique, qui évite au film d’être lourdingue. On a là un objet très intéressant, qui propose des choses, des idées de cinéma, tant mieux.

 Shame en mettant plus d’un mal à l’aise, réussit tout de même à nous faire comprendre la difficulté d’être addictif au sexe. Steve McQueen est aidé par deux excellents acteurs, Michael Fassbender et Carey Mulligan. A voir absolument.

Note :


Shame

Réalisé par Steve McQueen
Avec Michael Fassbender, Carey Mulligan, James Badge Dale, …

Date de Sortie: 7 Décembre 2011
Genre: Drame

Synopsis: Le film aborde de manière très frontale la question d’une addiction sexuelle, celle de Brandon, trentenaire new-yorkais, vivant seul et travaillant beaucoup. Quand sa sœur Sissy arrive sans prévenir à New York et s’installe dans son appartement, Brandon aura de plus en plus de mal à dissimuler sa vraie vie…

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