CairoConspiracyMovie2022

Un thriller religieux et politique captivant

Le cinéaste acclamé Tarik Saleh plonge dans une lutte de pouvoir meurtrière entre des chefs religieux et politiques impitoyables. Cairo Conspiracy, sorti en Europe sous le nom de Boy from Heaven, a remporté à la fois le prix François Chalais, décerné pour sa valeur journalistique, et celui du meilleur scénario au Festival de Cannes 2022. L’Université Al-Azhar est la principale institution d’apprentissage de l’islam sunnite; qui comprend quatre-vingt-dix pour cent des musulmans du monde. Son chef, le Grand Imam, est une autorité religieuse apparentée au Pape de l’Église catholique. Le film suit un jeune étudiant pieux qui devient involontairement un pion dans des machinations mortelles. Il montre les tactiques brutales d’une dictature militaire, l’oppression de l’endoctrinement théologique et les efforts effrayants que les deux iront pour contrôler les masses obséquieuses.

Adam (Tawfeek Barhom) pêche avec son père sévère et veuf sur la côte égyptienne près de son petit village. Il cache une lettre d’acceptation à la prestigieuse université Al-Azhar du Caire. L’imam local (Hassan El Sayed) le félicite pour un tel exploit. Adam est surpris lorsque son père apprend la lettre et décide de le laisser partir. Il ne discutera pas contre « la volonté de Dieu ».

Adam arrive nerveusement au Caire animé. Il traverse une foule de jeunes étudiants masculins portant des chapeaux Tarboush rouges. Adam couche dans un dortoir bondé. Son premier jour de prières, de cours et de récitations du Coran prouve que les études seront difficiles.

Al-Azhar est stupéfait

Films de Samuel Goldwyn

Al-Azhar est abasourdi par la mort soudaine du Grand Imam. L’école devient un point focal mondial alors que les musulmans attendent le choix de son nouveau chef. Le service de sécurité du dictateur égyptien Abdel Fattah El-Sissi, vu partout dans les photos de propagande, se précipite sur cette rare opportunité. Des germes de rébellion prennent racine au sein de la population. Choisir un imam sous leur contrôle contribuerait à apaiser ces menaces. Le général Al Sakran (Mohammad Bakri) charge le colonel fatigué Ibrahim (Fares Fares) de diriger l’opération critique. Ibrahim a déjà une taupe à Al-Azhar.

Adam est surpris d’être remarqué par Zizo (Mehdi Dehbi), l’assistant populaire du vénéré aveugle Sheikh Negm (Makram Khoury). On s’attend à ce qu’il soit choisi par le conseil de l’école comme prochain grand imam. La dictature ne peut influencer Negm et fera tout pour arrêter son ascension. Zizo prend Adam sous ses ailes, mais a une arrière-pensée. Il dit à Ibrahim qu’il veut sortir. Des éléments radicaux de l’école, les Frères musulmans interdits, le soupçonnent. Zizo a trouvé le pigeon parfait pour le remplacer.

Explorer la culture islamique

Saleh (The Nile Hilton Incident, The Contractor) fait un superbe travail en explorant les principes de la culture islamique et ses effets profonds sur la vie quotidienne. Nous voyons la discipline rigide de l’apprentissage à Al-Azhar. Adam embrasse le but religieux, mais est naïf et terriblement mal préparé aux circonstances désastreuses qui l’engloutissent. Il ne peut pas refuser Ibrahim. Les militaires le tueront. Les extrémistes djihadistes d’Al-Azhar sont tout aussi meurtriers. Adam doit gagner leur confiance sans s’exposer comme un espion. Il n’a littéralement nulle part où fuir. Chaque choix est mauvais.

Cairo Conspiracy cible un patriarcat religieux qui prône la vertu mais existe hypocritement dans le péché. Il n’y a pas de femmes à Al-Azhar. Les femmes n’ont rien à dire sur les questions religieuses qui définissent leur existence, mais sont convoitées par les religieux qui prêchent une stricte fidélité. Ces scènes frappent au cœur d’un grave dilemme culturel. Reléguer la moitié de la population en éleveurs asservis étouffe le capital intellectuel. Saleh dépeint des inégalités criantes.

Le troisième acte du film est absolument fascinant. Le subterfuge habilement comploté atteint un point culminant palpitant. L’inhumanité odieuse de la répression pointe le bout de son nez. Le régime autoritaire écrase les dissensions. Exécution, torture, ciblage d’êtres chers, il n’y a pas de règles pour assujettir le mal. Saleh a fui l’Égypte pour éviter l’emprisonnement, mais son art ne peut être réduit au silence. La vérité se faufile à travers les moindres fissures.

Cairo Conspiracy a un dialogue en arabe avec des sous-titres en anglais. Il est produit par Atmo Production, Memento Films et Oy Bufo Ab. Cairo Conspiracy est l’entrée de la Suède à l’Oscar du meilleur film international. Il sortira aux États-Unis le 1er janvier chez Samuel Goldwyn Films.

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