spider-man-une-version-avortee-par-david-fincher
|

Spider-Man : une version avortée par David Fincher

David Fincher aurait pu faire un film Spider-Man à la fin des années 1990. Qu’est-ce qu’on sait de cette version avortée ?

Ce n’est plus un secret pour grand monde, mais plusieurs réalisateurs de renom ont été envisagés pour faire leur version filmique de Spider-Man, avant la légendaire trilogie de Sam Raimi. Aux débuts des années 1990, on peut penser à la version de James Cameron, qui aura même inspiré de quelques éléments du film de 2002.

Mais à la fin des années 1990, Columbia Pictures (qui co-produira la trilogie de Raimi) envisage un autre cinéaste à la barre d’un film sur le Tisseur : David Fincher. À l’époque, le célèbre metteur en scène n’en était qu’à Alien 3Seven ou The Game, et était encore loin de Panic RoomZodiac ou encore Gone Girl. Il lui était pourtant donné l’occasion de faire vivre sur grand écran le plus sympathique des héros Marvel. Si David Fincher n’a jamais jamais concrétisé l’offre et délivré sa version très différente de Spider-Man, à quoi ressemblait-elle ?

RÉVÉLATION DU PROJET

En 2010, Sam Raimi a déjà abreuvé le monde de trois films Spider-Man. Le quatrième est alors attendu pour mai 2011. Mais le metteur en scène, victime du succès phénoménal de sa saga et de l’échec critique de Spider-Man 3 (sacré cocktail s’il en est), ne se sent plus de porter les aventures du Tisseur. En janvier 2010, le réalisateur quitte le navire en pré-production et provoque, avec son départ, celui de Tobey Maguire (l’interprète de Peter Parker), et l’annulation de Spider-Man 4 dans la foulée.

Immédiatement, le reboot The Amazing Spider-Man est annoncé pour juillet 2012. En 2011, pour la promotion de son film Millenium – Les hommes qui n’aimaient pas les femmesDavid Fincher révélait à io9 qu’il fut candidat pour réaliser le film Spider-Man avant Sam Raimi, et que l’offre lui a été relancée après son départ. Mais le réalisateur, incrédule face à l’oppressant cahier des charges qui s’est développé autour de l’industrie super-héroïque, a décliné la seconde offre.

Néanmoins, il a décrit ce à quoi aurait pu ressembler sa version, dans les grandes lignes :

« Mon sentiment sur ce que Spider-Man pourrait être est très différent de ce que Sam Raimi a fait ou voulait faire. Je pense qu’il a réalisé ce film parce qu’il voulait retranscrire les comics Marvel. Ainsi, je n’ai jamais été intéressé dans sa genèse. Je ne pouvais pas me voir faire l’histoire d’un type qui se fait mordre par une araignée rouge et bleue. C’était le problème… C’était quelque chose que je ne voulais pas faire directement. Je voulais commencer par Gwen Stacy et le Bouffon Vert, et je voulais tuer Gwen Stacy.

La séquence d’introduction que j’allais faire devait durer 10 minutes — en gros, une vidéo musicale, un opéra, qui devait vous emmener à travers l’histoire de Peter Parker. La morsure par une araignée radioactive, la mort de l’Oncle Ben, la perte de Mary Jane, puis le film aurait débuté sur la rencontre entre Peter et Gwen Stacy. C’était très différent. Ce n’était pas une histoire d’adolescents. C’était beaucoup plus l’histoire d’un type qui a accepté qu’il est un monstre.”

UN SPIDER-MAN TRÈS CASSE-GUEULE

Après lecture de cette note d’intention, on a vite fait de comprendre pourquoi Fincher a décliné la proposition d’un film Spider-Man post-Raimi. Le metteur ne s’en cache pas : il n’a pas d’affection pour l’aspect « comics » et chatoyant du personnage, préférant explorer la part d’ombre de ses responsabilités super-héroïques.

D’ailleurs en disant que son film aurait été « beaucoup plus l’histoire d’un type qui a accepté qu’il est un monstre”, le réalisateur aurait été tellement hors-personnage et hors-charte, qu’on aurait presque eu envie de le lâcher dans une salle avec des cadres de Sony, juste pour voir leurs têtes.

Mais il n’y a pas que le studio et les années 2010. Passer les débuts de la carrière du Tisseur, les réinventer à sa sauce (en tuant Mary Jane avant même que Peter ne rencontre Gwen, son premier amour), adapter l’arc encore controversé de La Mort de Gwen Stacy (qui a révolutionné non pas juste Spider-Man, mais toute l’appréhension de la littérature comics), et faire tirer comme conclusion à Peter Parker qu’il est un monstre… pas sûr que c’est ce que le public aurait voulu voir d’un premier film Spider-Man, même dans les années 2000.

En bref, pour autant que Fincher soit un monument du cinéma contemporain, il est difficile d’imaginer qu’il aurait pu être l’homme de la situation. Spider-Man est un personnage certes dramatique, mais c’est aussi dans sa persévérance, sa légèreté apparente et ses blagounettes insupportables qu’il se démarque, et qu’il contrebalance sa noirceur. Et ça, Fincher nous l’aurait maladroitement mis de côté pour nous faire une sorte de Logan (en plus dépressif) de l’Araignée sympathique du quartier. Merci mais non merci ?

A lire également